Ainsi va la vie... épisode n°50... LA MEMOIRE...
LA MEMOIRE…
On dit que la mémoire est sélective, malheureusement j’ai un problème… je me souviens de tout ou presque et c’est ce presque qui fait toute la différence. Les gens qui se souviennent vraiment de tout dans les moindres détails souffrent d’Hypermnésie. Je n’en suis pas à ce stade, quoi que. Non puisque j’hésite parfois sur un prénom, une date, un lieu, ouf ! Sauvé, mais jamais sur le déroulement d’un évènement.
Et ne dites pas que j’ai une mémoire d’éléphant, mon égo en prendrait un coup dans l’aile. Ces derniers mois j’ai pris un peu de poids et la comparaison avec ce joyeux pachyderme risque de me gêner aux entournures…
Le temps, et la sagesse qu’il engendre nous apprend à ne pas toujours dire ce que l’on pense et encore moins ce que l’on sait. D’abord parce que ce que l’on pense n’est pas obligatoirement une vérité universelle et ce que l’on sait, qui peut nous paraître anodin, ne l’est peut-être pas pour les autres.
L’éternel : « Je dis ce que je pense et si ça plait pas c’est pareil ». Est d’un incroyable égoïsme, puisque cette façon d’agir peut blesser, profondément blesser, alors à quoi bon ? Fort de ces deux convictions, dans la vie courante j’essaie de faire attention. Et de faire preuve d'une once de diplomatie.
Avoir de la mémoire c’est à la fois formidable et gênant. Gênant au point qu’il m’arrive, rarement mais ça m’arrive, de faire semblant d’avoir oublié pour ne pas devenir celui qui sait tout sur tout et a toujours raison… C’est gens-là sont chiants et j’ai dû l’être avant de rectifier le tir.
Avec certains artistes, surtout ceux que je retrouve après de très longues années, le plus gênant avec cette mémoire si particulière ; c’est qu’ils ne se souviennent plus très bien et moi parfaitement ! D’ailleurs dans quelques cas je crois qu’ils se souviennent aussi bien que moi mais l’oubli provisoire les arrange.
Alors, pour ne froisser personne, j’évoque mais je n’insiste pas parce que s’il n’y a pas ou plus de témoins ils pourraient penser que je galèje. Jusqu’au jour où…. ils me téléphonent pour me dire : « Tu sais ce que tu m’avais raconté… ca y est… ça m’est revenu… tu avais raison ». Mais en attendant que ça leur reviennent… j'étais mal !
Il y a quelques semaines j’ai revu Michel Orso et après une longue conversation ou justement ce jeune homme de plus de 80 printemps m’a prouvé qu’il avait lui aussi une formidable mémoire puisqu’on s'est racconté des histoires datant de Mathusalem … il m’a dit :
- Mais rappele moi, la première fois qu’on s’est revus à Paris c’était où… Tu t’en souviens ? »
- C’était chez Albert Assayag tu préparerais la chanson « Les petits parapluies » qui a obtenue quelques mois plus tard le grand prix de la SACEM…
- Mais c’est vrai !...Tu as vraiment une mémoire incroyable…
Surtout que cette chanson malgré son grand prix n’a pas obtenu un succès populaire et n’est même pas référencée sur YouTube
Une autre fois en parlant avec Laurence Alessandri de notre période Don Camilo elle m’affirmait que la vedette c’était Serge Lama... Bien sûr mais pas tout à fait. Quand il n’était pas disponible c’était Isabelle Aubret et la vraie vedette l’extraordinaire Jean Constantin… qui s’installait derrière son piano dans un costume rose bonbon et chantait : Ses pantoufles, son truc en plume et tant autres succès jusqu’à plus d’heures.
Des comme celles-là, qui sont gentillettes et des pires qui auraient pu faire les choux gras d'une certaine presse, je pourrais vous en citer des dizaines.
Cette mémoire fut un atout durant ma scolarité et développa inconsciemment mon penchant pour la dilettante. A l’école j’étais un élève très attentif même quand je donnais l’impression de me disperser je ne manquais en réalité pas une bribe des leçons développées par les professeurs. Mais une fois sorti de la classe, leçons, devoirs, révisions, trop peu pour moi… J’en foutais le minimum du minimum. J’obtenais toujours la moyenne, sauf en français heureusement, et je m’en contentais.
Quand j’avais un doute ou la certitude de ne pas avoir très bien compris ou pire quand je faisais pour de nobles raisons l’école buissonnière ; Il suffisait que je lise les cours piqués à une copine une ou deux fois pour les assimiler. Cours que je lisais en plus en diagonale.
Les choses se compliquaient dans des matières où le par cœur était impératif. Mais cette facilité évidemment m’a joué de bien mauvais tours par la suite. Jusqu’au jour où un prof, de français évidement, m’a dit : « On ne retient longtemps que ce qu’on a appris dans la difficulté » Si cette affirmation m’avais ouvert les yeux le temps qu’elle la prononce, dès qu’elle s’éloigna, mes paupières se refermèrent aussi sec.
Mais cette phrase en conseil sous-jacent je m’en servirais plus tard et abondamment à l’école de la vie où je bucherai comme un beau diable pour ne pas dire un dingue dépassant même les limites du raisonnable. En attendant ; Je travaillais peu, je me contentais d’être un élevé moyen, juste ce qu’il fallait pour passer dans la classe supérieure.
Il faut dire pour ma défense que ma vie d’enfant puis d’ado était bien plus remplie que la moyenne de mes petits camarades. Les études m’intéressaient mais une fois sorti les bancs de l’école ou du bahut je n’avais pas le temps. La journée les cours, le soir sport ou les petits boulots, le samedi et le dimanche le travail à la campagne ou à la construction de la maison familiale, dans laquelle je n’ai jamais vécu et pour les miettes d’heures restantes, une petite amie pour des amours ho! combien difficiles vous vous en doutez et quelques fréquentations limite zone rouge qui feront de moi un gentil Bad-boys. Et je vous passe la période qui chevauche tout ça à partir de laquelle j’ai commencé sérieusement à écrire et à chanter.
Mais puisque dans les choix classiques, a l'entrée d'une vie normale, il fallait cocher une case et qu’auteur compositeur interprète ensemble ou séparément n’était pas dans la liste la seule option restante devant laquelle j’aurais pu mettre une croix c’était : journaliste.
Mais mon père qui se refusait de voir avec recul et réalisme le contexte social dans lequel nous évoluions rêvait lui que son fils arbore un caducée sur son parebrise. Il me donnait le choix entre médecin ou médecin. Ambitions démesurées mais surtout en totale oppositions avec les miennes. En ce temps-là je l’écoutais religieusement même si ma vocation était ailleurs…. J’écrivais des chansons.
A l’instant, en me relisant, j’ai l’impression d’écrire un résumé de début de bio et ce n’était pas le but car qui pourrait s’intéresser à la biographie d’un illustre inconnu, même avec une minuscule notoriété, soyons honnête. Il faut cependant que je termine ce long préambule avant de revenir au sujet : La mémoire. Bien qu’en vous racontant tout ça je la fasse travailler cette sacrée boite a neurones.
Un jour, ces jour-là il fait souvent un temps maussade le ciel est bas et l’air humide et c’était le cas. Un jour donc, après mures réflexions, prenant mon courage à deux mains, je me décidais à expliquer à mon père que je n’envisageais absolument pas d’être toubib. J’avais provisoirement rangé ma panoplie de journaleux au placard pour lui annoncer le pire : Je voulais être "artiste". Artiste à temps plein ! Oui parce qu’artiste à temps partiel je l’étais déjà presque tous les vendredis, samedis et dimanches soir; quand je vous disais que ma vie était chargée.
« Artiste ? Ho putain ! » Non ce n’est pas vulgaire. C’est à la fois juste une ponctuation très courante dans le midi et les deux mots qu’il allait prononcer avant de me tirer cette tarte monumentale qui vous laissait les cinq doigts et sa chaleur cuisante un long moment.
Je m’y attendais. Mais ce jour-là, rien… Juste un regard foudroyant bleu acier dix fois plus douloureux et surtout au bout du long silence; un ordre ! L’ordre qu’il n’aurait jamais dû me donner :
« A partir d’aujourd’hui je ne veux plus jamais te voir écrire ! »
Je vous raconterai la phase intermédiaire si vous y tenez et la suite si vous insistez. Mais la suite immédiate pour ne pas faire trop long, la tartine est déjà copieuse j’espère qu’elle était gouteuse, la suite fut simple.
Quinze jours plus tard, sans son accord, du haut de mes 17 ans et des poussières, avec pour seuls bagages ; une jolie p’tit gueule dont je n’étais pas conscient, une petite valise, un sac de sport et 480 frs en poche je prenais le train de nuit pour Paris. 11heures de rails. Paris où je ne connaissais personnes sauf quelques artistes avec qui j’avais eu la chance de travailler dans le sud et qui ne furent pas, sauf à de très très rares exceptions, malgré leurs promesses des plus accueillants.
Si les débuts furent compliqués ils ne furent pas difficiles; Je connaitrais pire. J’y rencontrerais des gens aussi simples qu’extraordinaires et des artistes tellement exceptionnels que ma mémoire temporisera sur le reste.
Les coups durs, les coups bas, le ventre creux, la solitude, les galères… ces épreuves font partie de l’aventure. Si tout s’écrivait en rose, c’est une jolie couleur mais elle manque un peu de virilité à mon gout, l’histoire serait bien fade.
Ma mémoire a tout gardé ; les couleurs, les odeurs, les parfums, les regards, les rires et les sourires, les jeans, les tailleurs Chanel ou les bas résilles, les voix, les gestes, les bons et les mauvais jours, les nuits de doutes et les nuits d’espoir. les succès et les échecs, la fraicheur d’une coupe de champagne dans le cristal de laquelle se reflétait un regard et des lèvres inoubliables… ni le gout d’un simple jambon-beurre rue des Saint-Père à six heures du mat après trois jour de jeun involontaire…
Ainsi va la vie…
(A suivre...)
Je vous embrasse
Williams Franeschi
Et comme d'habitudes quelques photos d'Amis...
Brigitte... Christine... Katiba... Ida...Bernard... Odile...Dany...Sabine ... jean louis
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